Glossaire


Ce glossaire contient tous les termes spécifiques au Goulag nécessaires à la bonne compréhension des témoignages publiés sur ce site internet. Sauf indications contraires, la majorité des définitions ci-dessous, ainsi que les images, proviennent du Manuel du Goulag de Jacques Rossi (Paris, Le Cherche Midi Éd., 1997). Victime des Grandes Purges, ce dernier a été condamné à huit ans de peine pour espionnage. Il passera finalement plus de vingt ans (de 1937 à 1961) dans les diverses institutions pénitentiaires du Goulag, tels que la prison de la Loubianka, dans les prisons de transit, le camp de Norilsk ou encore la prison d’Aleksandrovsk. Une fois libéré, il entreprend la tâche de transmettre son expérience au travers de son encyclopédie du Goulag.

N.B. : Compte tenu l’étendue et la complexité du phénomène concentrationnaire en question, même une encyclopédie comme celle de Jacques Rossi, aussi digne de confiance soit-elle, ne peut englober la totalité de cette réalité. Il est donc possible et même probable que les descriptions ci-dessous ne correspondent pas à la réalité des camps du chantier 501-503. Le but du glossaire est d’accompagner le lecteur dans sa découverte d’un sujet qui ne connaît pas de vérité unique. Notre démarche se veut avant tout indicative.


Autogarde

Samookhrannik (самоохраник)

Littéralement «qui se garde lui-même». Le terme d’autogarde est traduit par Nikita Struv dans le Tome 2 de L’Archipel du Goulag d’Alexandre Soljénitsyne (Éd. Du Seuil, 1974, p.494) et désigne un membre de la garde intérieure du camp (cf. Service d’autoprotection, garde intérieur).


Bania

Bania (баня)

Littéralement, c’est le bain [...] La bania est surtout le bain à vapeur, l’équivalent du sauna [...] Désigne aussi la petite maison qui abrite le bain de vapeur. C’est le lieu traditionnellement réservé à l’hygiène corporelle et, dans les camps, un endroit très prisé parce que propre et chauffé.

(H. Dorion, A. Tcherkassov, Le Russionnaire, Petite encyclopédie de toutes les Russies, Sainte-Foy Québec : Ed. MultiMondes, 2001, p.24)


Baraque

Barak (барак)

Type d’habitation le plus courant pour les détenus des camps.

  1. Le dessin représente une baraque standard. Pour donner une idée des deux principaux types de baraques, la section gauche est équipée de deux niveaux de bat-flanc de type «couchettes» (cf. couchette), la section droite d'un bat-flanc d'un seul tenant. Dans le système de type «couchettes», chacun dispose pour dormir d'environ un mètre carré et demi. Le nombre de places est alors limité à 64. La section de droite est équipée de bat-flanc d'un seul tenant, toujours sur deux niveaux. Le nombre d'individus pouvant y coucher est variable (environ 120, ce qui fait à peu près quatre-vingts centimètres carrés par personne).

  2. En règle générale, les baraques n'ont pas d'étage, et sont équipées de deux niveaux de bat-flanc, rarement de trois. Elles sont habituellement construites avec les matériaux les moins coûteux, parfois du béton. Le plus souvent, les murs sont des doubles cloisons de planches bourrées de sciure ou de scories mélangées à de la sciure. Les deux côtés des murs sont ensuite plâtrés. Les toits présentent deux versants et sont recouverts de tôle, d'une double épaisseur de lattes, ou d'autres matériaux. Les détenus que l'on emploie à des constructions urbaines sont parfois logés dans l'un des immeubles qu'ils viennent de bâtir, provisoirement équipés de bat-flanc.

  3. Les deux sections d'une baraque sont séparées par un petit couloir qui fait office de vestibule (voir plan). Le mur du bout est percé d'une petite fenêtre. En général, il n'y a qu'un seul poêle par section, et une seule ampoule. Le vestibule qui sépare les deux sections n'est pas chauffé, mais il est équipé d'une ampoule et de lavabos rudimentaires sans eau courante. Les eaux usées s'écoulent dans des seaux. Il y a également dans ce vestibule deux tonneaux d'eau potable. Dans les baraques «verrouillées», l'un des tonneaux sert de tinette.
Généralement, le ménage et la surveillance de chaque section sont assurés par le responsable de baraque, ce qui, bien sûr, n’empêche pas les vols.


Cachot

Kartser (карцер)

Remarque : au début des années 30, les cachots des camps sont officiellement rebaptisés «isolateurs disciplinaires» (cf. CHIZO).


Camp de transit

Peressylka, peressylnaïa, peressylsny laguer, transitnaïa ili etapnaïa tiourma (переcылка, пересыльная, пересыльный лагерь, транзитная или этапная тюрьма)

  1. L’identité des arrivants est contrôlée d'après les données notées sur l’enveloppe contenant leur dossier, qui n'est pas ouverte. Les détenus sont ensuite fouillés et dirigés vers les douches, puis répartis entre les cellules.

  2. Le temps passé dans une prison de transit dépend de l'efficacité de l’administration et de la disponibilité des moyens de transport. Cela peut aller de quelques heures à plusieurs mois, avec une moyenne d’environ 12 jours. Les détenus en transit ont droit à une promenade quotidienne. Dans ces prisons, la discipline est relativement souple, l’administration et les prisonniers sachant fort bien que l’on n'aura sans doute pas le temps d’appliquer les peines de cachot avant le départ du coupable.


Cantine

Lariok (ларёк)

  1. Au lendemain du coup d'Etat bolchévique, les autorités continuent à respecter la tradition tsariste qui permettait aux détenus d'acheter pratiquement ce qu'ils voulaient. Dans les camps nouvellement créés où il n'existe pas encore de cantine, ce sont les surveillants qui se chargent d'acheter aux détenus les articles que ceux-ci leur commandent. Le régime soviétique va limiter systématiquement la quantité et la gamme des produits autorisés.

  2. Au début, ces limitations sont fonction de la catégorie à laquelle appartient le détenu (Règlement des lieux de détention généraux du 15 novembre 1920, art.173; Recueil des lois de la RSFSR de 1921, 23-24:141). Plus tard, elles s'expliquent par les difficultés économiques du pays. Au début des années 30, dans les camps, le sucre, puis d'autres denrées, notamment le pain, ne sont vendus qu'aux détenus accomplissant la norme de rendement. À partir du milieu des années 30, dans les prisons, les achats sont limités à 50 roubles par mois et par détenu. Dans les années 60, les restrictions deviennent plus sévères (cf. 3 ci-dessous). Du fait des difficultés d'approvisionnement générales dans tout le pays, le choix des denrées dans les prisons et les camps ne cesse de diminuer, et les détenus affamés ne trouvent plus à la cantine que des bonbons et des cigarettes hors de prix.

  3. Le Code de redressement par le travail de 1970 légalise les restrictions draconiennes introduites par une instruction secrète dès le début des années 60: en fonction de la catégorie à laquelle ils appartiennent, les détenus sont autorisés à dépenser de 2 à 7 roubles par mois, à condition qu'ils aient gagné cet argent pendant leur détention.

  4. Jusqu'au début des années 60, les cantines des camps acceptent les règlements par virement ou en liquide. Les cantines des prisons, elles, n'acceptent que les règlements par virement depuis le milieu des années 20. À partir du début des années 60, le règlement par virement est généralisé dans tous les établissements pénitentiaires.


Cave

Fraïer (фраер)

  1. Individu n'appartenant pas à la pègre et, par conséquent, gibier que les truands peuvent chasser à volonté.
  2. Pour désigner les individus incapables de s'adapter à I'univers goulaguien


Châlit

Nary (нары)

Cadres de lit sur lesquelles sont posées des planches de bois. Ce terme désigne généralement l’endroit où dort le détenu.


«Chiennes»

Souka (сука)

Truand ayant enfreint la loi du Milieu (cf. guerre des chiennes). Dans les camps ce terme désigne les détenus de droit commun qui ont accepté de traiter avec la direction du camp et à qui on délègue un certain nombre de tâches en échange de privilèges. Cette forme de sous-traitance allège les charges des gardiens, mais aggrave les conditions des autres prisonniers qui se retrouvent soumis à ces truands collaborateurs.

Remarque : au temps des tsars, les truands employaient ce mot pour désigner un policier. La nouvelle acception du terme est apparue à la fin des années 20.


CHIZO

Chizo , chtrafnoï izoliator (ШИЗО, штрафной изолятор)

Isolateur disciplinaire. Appellation du cachot dès le début des années 30, dans les camps et les colonies (cf. cachot).


Colonne

Du russe kolonna (колонна)

Secteur de camp affecté à la construction de routes ou de nouveaux camps (cf. secteur de camp, l/o).


Couchette

Vagonka , vagonnaïa sistema (вагонка, вагонная система)

Type de bat-flanc dont sont équipées certaines baraques de détenus, constitué de quatre «couchettes» disposées sur deux niveaux. Ces ensembles de quatre couchettes sont solidement fixés au sol et séparés les uns des autres par un petit espace.


Décompte

Zatchoty (зачеты)

«L’exécution par un détenu issu du milieu des travailleurs d'une performance particulièrement productive et l'acquisition par ce même détenu d'un savoir-faire professionnel [...] sont encouragées par un décompte selon lequel deux journées de travail équivalent à trois jours de la peine infligée » (Code de redressement par le travail de 1924, art. 52). L’existence de cette règle, puis son maintien quand l’administration l’a supprimée a été l’objet de plusieurs mouvements de protestation dans les camps.


Détenu politique

Politzaklioutchonny, politicheski zaklioutchonny, politik (политзаключенный, политический заключенный, политик)

De 1917 au début des années 40, «contre-révolutionnaire», «kr». De 1926 à 1959, «cinquante-huit» (en référence à l’article 58 du Code pénal). Du début des années 30 jusqu'à l'effondrement de l'URSS, «élément antisoviétique». Remarque : à l'origine, ce terme est employé au même titre que «contre-révolutionnaire», mais à la fin des années 30, lorsque le chauvinisme impérialiste soviétique remplace de plus en plus l'internationalisme, il finit par l'évincer. Dans le Code pénal de 1960, on utilise l'expression “condamné pour crime d'État particulièrement dangereux” (de la haute trahison à l'agitation antisoviétique).


Droit-commun

Bytovik (бытовик)

Ce terme désigne les prévenus ou condamnés pour délit de droit commun par opposition aux politiques (cf. détenu politique). Ce ne sont pas obligatoirement des truands.


Equipe/Brigade

Brigada (бригада)

Dans les camps, groupe d’environ 15 à 35 détenus travaillant ensemble. Une équipe est dirigée par un chef d’équipe. […] Elle porte soit le nom de son chef, soit un numéro. Ses membres sont logés dans la même section d’une baraque.


Guerre des chiennes

Soutchia voïna (сучья война)

Guerre impitoyable opposant les truands «réguliers» aux «chiennes».

  1. Au temps des tsars, le Milieu (pègre) constituait une communauté d’où les traîtres étaient impitoyablement exclus. À partir des années 20, la Tchéka-GPOU-NLVD-MVD s’efforce par tous les moyens de briser la solidarité des truands. Le nombre de chiennes (ou traîtres) ne cesse d’augmenter, entraînant des massacres entre truands.

  2. En été 1941, beaucoup de voleurs, officiers de réserve, sont appelés sous les drapeaux (ce qui pour le Milieu, revient à collaborer avec les autorités). À leur retour, les truands «réguliers» leur livrent une guerre sans merci, connue sous le nom de «guerre des chiennes».

    1. La guerre des chiennes est systématiquement utilisée par les autorités pour faire exterminer les truands les uns par les autres. À cet effet, les bandes ennemies sont intentionnellement regroupées dans les mêmes locaux. Cette méthode est également utilisée pour faire massacrer les politiques. L’administration n’intervient généralement pas tout de suite dans les rixes, laissant s’accumuler les cadavres.
    2. Si ces méthodes n’aboutissent pas à la disparition du Milieu, elles n’en détruisent pas moins la solidarité entre truands.


ITL

Ispravitelno-troudovye lagueria , (Исправительно-трудовые лагеря)

Camp de rééducation par le travail. Nouvelle appellation des camps de concentration à partir de 1930. On appelle aussi ITL des complexes de camps. Exemple : l’ITL de Norilsk.


Komsomol

Komsomoltsy (комсомолцы)

Membres des Jeunesses communistes.

Comme la propagande soviétique n’arrête pas de claironner les mérites des komsomols sur les glorieux chantiers du communisme (complexes industriels, villes, barrages, voies de communication, etc.), les détenus, par dérision, se désignent eux-mêmes comme des “komsomols.” Sur ces chantiers, il y avait bien des komsomols, mais seulement parmi les gardiens.


Lagpounkt

Contraction du russe laguerny pounkt (лагпункт, лагерный пункт)

Filiale d’un secteur de camp installée à proximité d’un chantier éloigné (cela permet de réduire le trajet à pied des détenus, ainsi que le nombre des soldats d’escorte). Le lagpounkt dépend du directeur du secteur de camp, il est géré par son administration qui, en cas de nécessité, y envoie son personnel : un ou plusieurs membres du service d’ordre, un répartiteur, un aide-médecin, etc.


Norme

Norma (норма)

  1. On applique aux détenus les mêmes normes qu'aux ouvriers libres, c'est-à-dire des normes calculées pour des travailleurs spécialisés, alors que les détenus sont attelés à des tâches qui, très souvent, ne correspondent pas à leurs qualifications professionnelles (ainsi, des mineurs, des professeurs, des officiers, des menuisiers, des journalistes, des chanteurs d'opéra, etc., sont employés à l'abattage des arbres, à des travaux de terrassement et autres). En outre, leur situation matérielle étant bien inférieure à celle des ouvriers libres, il leur est plus difficile de remplir la norme. À partir de la Grande Purge, leur journée de travail est portée à 10 heures, puis, de l94l à 1946, à 11 heures et demie, la norme de production étant proportionnellement augmentée, sans tenir compte de la fatigue accumulée.

  2. À l’abattage des arbres, la norme de rendement journalière est de 10 mètres cubes par homme. Pour l'extraction du charbon, elle est de 5,5 tonnes (années 30), etc. Remarque : d'après les notes du prince Volkhonski, un décembriste, dans les années 30 du XIXe siècle, la norme de rendement pour l'extraction de minerai était de 3 pounds (48 kg) par jour et par homme.

  3. La nourriture des détenus dépend de leur rendement, mais surtout de l'application de la norme par le normeur. Le talent du chef d'équipe dans la rédaction des rapports et la complaisance de l'employeur sont donc déterminants.


PPU

Peredovoï pounkt oupravlenija (передовой пункт управления)

Direction des postes avancés
(Список русских сокращений, применяемых в СССР, p.210)


Sans-escorte

Beskonvoïny (безконвойный) ou raskonvoïrovanny (расконвоированный)

  1. Un "sans-escorte" est un détenu muni d'un laissez-passer. On dit également un "désescorté", un "laissé-passer", ou encore un "libre-marcheur".

  2. Groupe ou équipe de détenus autorisés à se rendre au travail avec un laissez-passer collectif et à travailler sans surveillance.


Secteur de camp, l/o

Lagotdelenie , l/o (лаготделение)

Unité de base d’un complexe de camps. Il en existe plusieurs répartis selon différentes fonctions (voir images ci-dessous)


Section sanitaire

Santchast (санчасть)

Organisme responsable de l’hygiène et de la santé des détenus d’un établissement pénitentiaire (camp, prison, colonie, etc.)


Service d'autoprotection, garde intérieure

Samookaraoulivanie, samookhrana, vnoutrenniaïa okhrana samookaraoulivanie, samookhrana, vnoutrenniaïa okhrana (самоокарауливание, самоохрана, внутренняя охрана)

Dans les camps, service de garde confié pendant un temps aux détenus eux-mêmes. Instauré pour la première fois dans le camp des Solovki au début des années 20, il est ensuite étendu aux autres camps. La garde intérieure est d’abord confiée uniquement à d’anciens tchékistes condamnés pour délits de droit commun et par la suite, à n’importe quel droit commun, de préférence des condamnés pour délits militaires. Au milieu des années 30, cette garde intérieure est supprimée, mais perdure dans certains camps jusqu’au début des années 40. […] Remarque : les membres de cette garde intérieure, craignant de perdre leur poste privilégié, sont bien plus durs envers les détenus que les gardes libres.


Tchékiste

Tchekist (Чекист)

    1. Employé de la Vétchéka, la police politique du 7(20) décembre 1917 au 6 février 1922.
    2. Par la suite, la police politique change plusieurs fois de nom, mais ses cadres restent à tout jamais nostalgiques de l'époque glorieuse de la Vétchéka.

  1. Maxime Gorki et, à sa suite, toute la propagande soviétique, appellent les cadres de la GPOU des "tchékistes". Au plus fort des purges staliniennes, en 1937-1938, ce "titre" redevient officiel, alors que la Tchéka n'existe plus depuis 1922.


Tinette

Paracha (параша)

Cuve en bois ou en métal avec des poignées et un couvercle.

Conformément au Règlement intérieur des prisons, les prisonniers sont tenus de vider et de nettoyer la tinette lorsqu’ils sont conduits aux toilettes. Dans les cellules communes, c’est le responsable de cellule qui en est chargé. Dans les petites cellules, la tinette a le volume d’un seau. Dans les grandes, de huit à dix seaux. Une tinette bien remplie peut peser jusqu’à 120 kg. Elle est portée par deux hommes. Dans les cellules de récidivistes, le couvercle de la tinette est attaché à une chaîne, pour éviter qu’il ne serve d’arme lors des rixes. La tinette est placée près de la porte. Dans les cellules surpeuplées, cet endroit est toujours humide. La place à côté de la tinette est déshonorante. L’utilisation de la tinette pour «la grosse commission» est considérée, selon le savoir-vivre carcéral, comme un outrage à la communauté.


Transport, convoi

Etap (этап)

  1. Généralités
    1. Un convoi peut être constitué de plusieurs milliers de personnes et parcourir des milliers de kilomètres en utilisant différents moyens de transport.
    2. Les prisonniers ne sont jamais informés de leur destination, et ne sont avertis du départ qu'au dernier moment. En effet, certains habitués des camps, ayant fait leur trou et craignant que leur sort ne soit pire ailleurs, feraient tout pour éviter de partir. C'est pourquoi le départ des convois est préparé dans le plus grand secret et, le jour dit, on procède à des rafles-surprises.

  2. Transport fluvial
    1. Les détenus (plusieurs centaines) sont chargés dans la cale, équipée de bat-flanc à plusieurs niveaux si rapprochés qu'ils ne peuvent s'asseoir. Ils n'ont pas non plus la place de se promener, si bien qu'ils restent allongés pendant tout le voyage, qui peut durer de 2 à 3 semaines.
    2. Au début, on laisse monter les détenus sur le pont par petits groupes pour prendre l'air. La cuisine de campagne de l'escorte leur prépare des repas chauds. Lors de la Grande Purge, ils n'ont plus le droit de sortir et les repas chauds sont supprimés. Les détenus reçoivent une ration dite "sèche" (produits distribués en mains propres aux détenus, avec lesquels ils se préparent eux-mêmes leur nourriture.

  3. Convoi à pied
      Les convois à pied sont relativement rares, la plupart du temps pour des trajets très courts. Les détenus traversent les endroits habités par rang de dix. Tous les deux ou trois rangs, à gauche et à droite, ils sont encadrés par des gardes armés de fusils. Au début et à la fin de la colonne, il y a également des gardes armés avec des chiens. Les curieux sont dispersés. À partir de la Grande Purge, la population apprend à ne plus remarquer ces convois (au temps des tsars, il était d’usage de donner aux prisonniers du pain, du tabac, etc., ce qui est strictement interdit par les autorités soviétiques).


«Voleurs»

Vor (вор)

  1. Définition du terme : Le terme «voleur» a deux sens : en russe normatif, il signifie la même chose qu’en français, alors qu’en argot de la pègre, il désigne un truand (indépendamment de sa spécialité) qui respecte la loi du Milieu.

  2. La loi du Milieu
    1. Le «voleur honnête» ou «voleur dans la loi» ne respecte que la loi du Milieu. Il ne fait aucun cas de ceux qui ne sont pas des «vrais voleurs» comme lui, qu’il s’agisse des caves, d’autres truands ou des autorités.
    2. Selon de vieilles traditions, un «vrai voleur» ne doit sous aucun prétexte manquer au devoir de solidarité envers ses pairs, quitte à risquer sa vie. Il ne collabore jamais avec les autorités. Il ne s’en prend jamais sur la voie publique à une femme seule avec un enfant. En prison, il ne touche pas à la ration de pain d’un autre détenu, même si c’est un cave. Malheureusement, il faut bien constater que la dégradation générale des mœurs n’épargne pas non plus la pègre ! […]
    3. Un «vrai voleur» tient beaucoup à son honneur. Il le perd s’il transgresse la loi et s’il est sodomisé, surtout par des «chiennes».

  3. Les règlements : Le monde des truands constitue une sorte de club fermé. Des règlements non écrits les obligent à se conformer à une loi, elle aussi non écrite. Toute infraction est jugée par un conseil de truands (le «tribunal d'honneur»), et l'individu reconnu coupable est condamné sans appel soit à l'exclusion du Milieu, soit à la mort (généralement, il est décapité, et sa tête tranchée est présentée aux «juges»).


Zek

Zek (зек, зечка au féminin)

Ce mot a été créé à partir de l’abréviation officielle z/k, c’est-à-dire détenu/soldat du canal (détenu travaillant sur les chantiers du canal de la mer Baltique à la mer Blanche 1931-1933). Il est devenu courant en russe pour désigner un détenu.


Zone

Zona (зона)

  1. Généralement, l’enceinte d'une zone est constituée de poteaux en bois enfoncés dans le sol sur un tiers de leur hauteur. Ils mesurent de deux mètres et demi à huit mètres en fonction des conditions locales. La distance entre les poteaux est d'environ six mètres. Plusieurs rangées de fil de fer barbelé sont tendues horizontalement entre les poteaux, et deux en diagonale. L’enceinte peut également être en bois, en pierre, etc.

  2. À proximité des régions habitées, l’enceinte est en planches, en briques, etc. (afin que l'on ne puisse voir ce qui se passe à l'intérieur). Cette clôture est obligatoirement surmontée de barbelés. Dans les camps de travaux forcés (KTR), les camps spéciaux et les camps à régime sévère, l'enceinte est double.


Zone interdite

Zapretnaïa zona, zapretka (запретная зона, запретка)

Zone dégagée de part et d’autre des barbelés, de la palissade ou du mur délimitant le camp. Large de 3 à 20 mètres, suivant les cas, elle est signalée par des fils barbelés tendus entre des poteaux d’environ 80 centimètres, parfois, simplement par des pancartes "Zone interdite". Elle est systématiquement ratissée afin que la moindre trace de pas soit visible. Ce travail est confié à un détenu de toute confiance [...]. C’est inutile lorsque le sol est couvert de neige. Les gardiens sur les miradors ouvrent le feu sur tout individu qui tente de pénétrer dans la zone interdite, à l’exception de ceux qui y sont envoyés par la direction pour la ratisser.